mardi 18 mars 2014

Retour à Lagos... ou les joies du protocole de sécurité

Ca nous fait quoi, quand à la fin des vacances on se dit "Allez il est temps de rentrer chez nous ... à Lagos", lorsque pour les autres, rentrer chez soi signifie rentrer justement en France, et surtout lorsque chez soi c'est au ...Nigeria?

Aujourd'hui ça nous fait ni chaud ni froid, et  on est tout aussi contents de rentrer chez nous... si si! Lagos ou ailleurs, tant qu'on y a notre petit cocon familial...

Nomad are you mad?

Sûrement... faut avoir un petit grain de folie (ou carrément un champs de blé) lorsqu'on arrive à un point ou on est soulagée de poser ses valises dans le chaos urbain de Lagos. 
Pour etre honnête ca n'a pas toujours été le cas: les premiers temps, le retour au pays de l'or noir s'avérait être une rude épreuve psychologique.
Près de 3 ans après, on rentre avec le sourire, on ne se pose même plus de questions.
Le plus merveilleux dans tout ça, c'est le fait de ne plus avoir de craintes, ni d'etonnements,  de vivre ces choses "lagosiennes" commes si elles etaient tout à fait normales, pourtant Dieu sait que parfois c'est tout sauf normal!

fafa-expat.blogspot.com 



Samedi 15 mars 2014, Murtala International Lagos airport. 

Nous sortons tout juste de l'avion, il fait 30 degres , on se debarrasse de nos manteaux. Un type envoyé par le facilitateur travaillant pour la société de mon mari, vient nous chercher dès la sortie de l'avion. Son visage ne me dit rien, le facilitateur n'ayant pu se déplacer  a envoyé ce monsieur sorti de nulle part. 


On le suit, afin de ne pas faire la queue. Manque de bol, les douaniers ne le connaissent pas et commencent à exprimer leurs mécontentements. 15 minutes plus tard, on passe enfin l'immigration, puis on nous demande nos carnets de vaccination contre la fievre jaune, obligatoires pour entrer sur le territoire nigerian dès l'age de 2 ans.
Notre poupée aux grosses joues n'a que 16 mois, mais a fait son vaccin la veille du départ, en vue d'un prochain séjour au Congo, où le risque de fièvre jaune est plus élevé qu'à Lagos. 

Le douanier ouvre le carnet de notre loupiotte, son regard s'illumine, il sait qu'il va pouvoir nous taper sur les nerfs.  
" Vous avez vu la date à laquelle elle a fait son vaccin? Il fallait le faire 10 jours avant votre départ".
" Le vaccin n'est obligatoire qu'à partir de 2 ans de toute façon' rétorque mon mari.
" Je connais mon metier, le vaccin se fait à partir de 9 mois" dit-il en faisant mine de s'énerver. 
" Oui mais à Lagos il n'est obligatoire qu'à partir de 2 ans" rajoute mon homme qui commence à perdre patience, en voyant que l'énergumène envoyé par le facilitateur ne bronche pas un mot pour essayer d'arranger les choses, alors que cela fait parti de son job. 

"Bon , qu'est ce qu'on fait alors monsieur?" demande le douanier avec un large sourire, l'air de dire " Balances tes Nairas  et on n'en parle plus". 
Nous répondons du tac au tac que nous n'avons rien. Je jette un coup d'oeil sur ma gauche, un expat, la soixantaine, bedonnant, vient de glisser un billet en serrant la main à un douanier... le bonhomme n'avait visiblement pas envi d'ouvrir sa précieuse valise.

L'agent nous reposera la question 3 fois, et nous repondrons 3 fois que nous n'avons rien. Il sait que nous ne sommes pas en tort, et comprend rapidement que nous ne sommes plus "fresh fish" depuis longtemps. Il finit par cesser de froncer les sourcils, et lâche l'affaire. Il tente même de saluer notre poupée, histoire de faire comme si de rien n'etait, mais celle-ci le repousse comme on repousserait un lépreux , il se vexe, et moi je ris interieurement " bien fait!" 

Nous sortons de l'aéroport, accuillis par 3 jeunes hommes envoyés par la société de mon mari, ils portent tous un badge et l'uniforme. Ils sont présents à chacun de nos départs et chacune de nos arrivées. L' un pousse le chariot, l'autre tire le bagage à main, et le dernier se propose de pousser la poussette, ma fille sourit, elle le reconnait. 
Arrivés à la voiture, un homme vêtu d'un costume noir, chemise blanche,  façon "men in black" nous attend, c'est celui qui gère tout le protocole de sécurité
 Un pick up blanc avec des flics armés jusqu'aux dents (les mopols ou mobile police) est garé derrière notre voiture. Ils nous saluent également.

 Normal quoi...

Le matin même nous nous sommes réveillés libres et totalement invisibles, dans un des quartiers les plus beaux et calmes de la capitale française, où le seul danger serait de glisser sur une dejection canine ou de recevoir sur la tête un mégot malencontreusement jeté par une fenêtre... Et voilà que pour rentrer chez nous il a fallu mobiliser à peu près 10 gars, dont la moitié est armée... juste au cas où... 

Un des jeunes hommes gare la poussette entre notre voiture et le pick up des mopols, le temps d'aider les autres à ranger les valises. 
Un militaire faisant sa ronde s'approche de nous, il est à environ 20 centimètres de la poussette, kalachnikov en main, il papote avec les mopols du pick up blanc.
 Mon regard s'arrête sur cette scène: ma fille dans sa poussette, une kalachnikov chargée  à 20 centimètres d'elle.  
" Oh p...." 
Mon coeur fait un bond. Je la detache immédiatement de sa poussette, et l'emmène de l'autre côté de la voiture. Le jeune homme qui avait garé la poussette entre les 2 véhicules se met à paniquer "where is the baby?". 
Je viens à lui, l'enfant dans mes bras en rigolant " I kidnapped my own child sorry". Lui, riait jaune "Oh my god!!!". Je vous l'accorde, la blague sur le kidnapping fut de très mauvais goût! L'homme se remet de ses émotions, les 2 autres se moquent de lui. 

 Le monsieur en costume noir, en charge de notre sécurité s'installe dans notre véhicule  .  Il vérifie si la ceinture de ma fille est bien bouclée.   Cette dernière se met à geindre parcequ'elle n'aime pas être attachée. Le monsieur lui dit alors d'une voix douce et réconfortante,  la voix du mec qui gère la situation  " Don't worry baby, I'll take you home safely!"....  bof pas très efficace...louloute aux grosses joues grogne toujours! 

On se met en route. Wilson, notre chauffeur, habituellement bavard en voiture ne dit pas un mot, les mains crispés sur le volant, les yeux rivés sur la route, il conduit sous pression...  l'homme en noir est assis à côté de lui et surveille même sa conduite. " I m here for your safety" qu'il nous  dit, en se retournant vers nous, tout en affichant un sourire bright, au cas où on n'aurait toujours pas compris l'intérêt de sa présence. 

Le pick up des mopols nous suit de près, et dès que Wilson tente de doubler un chauffeur un peu trop borné , ces derniers se mettent à klaxonner et/ou enclencher leur sirène pour que l'entêté nous laisse passer sans faire d'histoires... 
La conduite du chauffeur est impeccable, on arrive chez nous, sains et saufs après avoir survécu à un danger "visiblement invisible". 

Une fois à l'appart, on déballe nos affaires dans la joie et la bonne humeur... comme si de rien n'était,  comme si tout cela était tout aussi normal qu'être entassées comme de vulgaires sardines dans le metro parisien.  Ahh...  Home sweet home! 

2 commentaires:

  1. de toute façon ils naissent avec la corruption dans le sang
    elle est légitime pour eux

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ce commentaire est haineux et gâche vraiment la beauté du témoignage.

      Supprimer

Un avis? Une réflexion? une question? N'hésites pas à commenter...